Le très renommé think tank Terra Nova vient de publier un rapport qui va faire date, rédigé par l’universitaire Jérôme Blanc et intitulé « Politiques territoriales de résilience et de transition écologique : la piste des monnaies locales ? » Nous vous en proposons dans cet article les « bonnes feuilles » de ce rapport, c’est-à-dire quelques extraits significatifs.

 

Les monnaies locales comme outils de résilience économique et de transition écologique :

« Les monnaies locales font partie de la palette d’outils permettant de renforcer la résilience d’un territoire à une crise, qu’elle vienne d’un choc économique, sanitaire ou environnemental. La crise sanitaire que nous traversons illustre la plus grande probabilité de survenue d’une de ces crises dans un horizon plus ou moins court. Les monnaies locales peuvent également être saisies comme des outils utilisables pour avancer dans la transition écologique au niveau des territoires. »

 

Les collectivités appelées à s’appuyer sur les monnaies locales :

« Depuis le début des années 2000, on observe un assez large engouement pour ces outils en France, avec des initiatives diverses et hétérogènes et, à ce jour, environ 80 monnaies locales en activité. Le fait que la monnaie constitue un outil capable de relier les agents économiques d’un territoire et un véhicule de valeurs sociales laisse raisonnablement penser que la transition écologique pourrait s’appuyer sur elle et que les collectivités locales pourraient s’en saisir pour construire des politiques locales de transition et de résilience territoriale. »

 

Quand l’Eusko ouvre la voie pour les autres monnaies locales :

Les collectivités locales « ne peuvent pas réaliser de dépenses directement en monnaie locale. Un conflit entre la Ville de Bayonne et l’État, en 2018, a porté sur ce point. Bayonne voulait pouvoir réaliser certaines dépenses en eusko (indemnités d’élus, subventions, achats publics). Après plusieurs étapes contradictoires devant les tribunaux, et avant que le Conseil d’État puisse se prononcer sur un recours intenté par la Ville, un accord amiable a été passé, à la suite duquel l’association peut être mandatée par l’un de ses membres pour recevoir un paiement de collectivité en euros pour le lui reverser en monnaie locale. Cela substitue à une règle de droit public une règle relevant du droit privé. Les conclusions de cet accord ont été utilisées ensuite par d’autres associations, à Nantes, Chambéry ou Grenoble, pour rendre possible la dépense en monnaie locale. »

 

Des recommandations à l’État pour qu’il laisse se déployer le potentiel des monnaies locales :

« Il faudrait que les collectivités puissent disposer d’un compte en monnaie locale leur permettant encaissements et décaissements directs en monnaie locale. Le circuit serait alors bouclé. Ajoutons que les EPCI (établissements publics de coopération intercommunale) ont, parmi leurs prérogatives, l’établissement d’une fiscalité propre. Un autre pas en avant pourrait consister à établir que la fiscalité locale peut être réglée en monnaie locale. Cela n’impliquerait aucune obligation de le faire de la part des contribuables concernés mais renforcerait le bouclage du circuit monétaire en fournissant aux contribuables utilisateurs de la monnaie locale un moyen important de l’employer. »

 

Terra Nova fait partie des think tanks de référence en France, et son plaidoyer pour les monnaies locales signifie que les monnaies locales pourraient bien, dans les années à venir, amener à l’Etat à encourager leur développement comme partenaires l’action publique pour la Transition écologique et la relocalisation de l’économie. Ce rapport ouvre, en plus des extraits ci-dessus, des pistes très intéressantes sur la manière dont les monnaies locales pourraient servir à financer la Transition écologique, et à faire évoluer les comportements de manière beaucoup plus massive qu’actuellement, en s’appuyant sur les travaux des économistes de référence comme Michel Aglietta

L’Eusko participe à cet dynamique collective pour les monnaies locales par son action propre, mais aussi en travaillant au sein du Mouvement SOL, aux côtés des autres associations porteuses de monnaies locales, à un changement d’échelle global des monnaies locales en France.